BM : Bonjour Monsieur Takeu Ndaago, qui êtes-vous et quel est votre parcours ?
Je vous remercie de prime à bord. Je profite de l´occasion pour féliciter votre initiative et l´engagement de la jeunesse dans le processus de l´autodétermination.
Je suis né en 1969 au Cameroun et je vis actuellement à Hambourg, une magnifique ville portuaire en Allemagne. Après l´obtention de mon Baccalauréat D à Douala, j´ai commencé mon parcours académique à la faculté de science de l´université de Yaoundé, couronné par une licence en Biochimie. Mon parcours universitaire a continué à Hambourg, à l´université technique de Hambourg-Harbourg (TUHH) jusqu´au diplôme d'études universitaires générales « Vordiplom ». J’ai poursuivi à l´école supérieure des sciences appliquées de Hambourg (HAW) où j´ai obtenu mon diplôme d´ingénieur en construction mécanique avec spécialisation dans la technique de production et management. Quelques années plus tard, parallèlement à mes activités professionnelles dans le domaine de l´énergie, j´ai suivi une formation spécialisée pour devenir un Manager certifié en Energie.
BM : Pouvez-vous nous présenter votre société, SellNow Marketing ?
Fondé en 2015, SellNow Marketing est spécialisé dans le placement des produits et le développement des marques.
SellNow Marketing a choisi le secteur de l’énergie comme cheval de bataille. À ce titre, la structure conseille les ménages et les entreprises dans la réduction des coûts énergétiques ainsi que l’utilisation efficiente de l’énergie. SellNow Marketing, dans son expansion, s‘est lancé depuis 2016 dans le développement des marques, la promotion événementielle et le placement des produits en créant des lignes de ventes innovatives et la formation du personnel sur les techniques de vente.
SellNow Marketing est aussi engagé au Cameroun avec d’autres ingénieurs de la VKII (Association des Ingénieurs et Informaticiens Camerounais) sur le projet de la décentralisation de l’énergie au Cameroun et en Afrique.
Pour plus d'informations, visitez httpsww.facebook.com/SellNowMarketing
BM : Quelle est votre vision de l’entreprenariat et pourquoi vous êtes-vous lancé ?
J´ai été inspiré par une pensée banale qui stipule que nous sommes à 90% responsables de nous-même. A bien y réfléchir, c´est le fondement même de l´entreprenariat : cette idée harmonise bien la notion d’entreprendre sous le paradigme africain qui nous enseigne que chaque être humain a la capacité de se connecter à l´intelligence universelle, la possibilité de « prendre-entre ». C’est-à-dire, choisir dans un champ d´ondes illimités tout ce qui est utile pour son développement personnel, celui de sa famille, son groupe, sa communauté, sa nation et l´humanité toute entière.
Logiquement, nous sommes donc tous des entrepreneurs conscients ou inconscients.
Ma vision de l´entreprenariat se résume au simple fait d´être chaque jour la meilleure version de ma personne, Sell Now (Vendre Maintenant) symbolise bien cette vision.
BM : Quels sont les principaux challenges auxquels vous avez dû faire face ?
Le premier challenge pour moi a été d´apprendre, parfois à mes dépends ; de me mettre véritablement dans la peau d´un indépendant (contrairement au statut d´employé). Les exigences en termes de discipline, organisation, gestion du personnel, gestion des impôts et des partenaires sont plus importants. L’autre challenge consistait à s´établir sur un marché, constituer une clientèle fidélisée, grâce à un service de qualité et à la demande de recommandations. Le challenge en continu est le recrutement et la formation au métier de conseillé en Energie.
BM : Quelles sont vos plus belles réussites ?
SellNow a contribué à l´entrée dans le marché de l’énergie électrique et du gaz des entreprises comme Shell et Total. Mon équipe et moi occupons la 3e place sur 300 agences de distribution en termes de quantité de contrats placés chez les clients. Nous avons aussi réussi à développer des concepts pour 4 grands producteurs et distributeurs régionaux pour l´acquisition de nouveaux clients, la reconquête des clients mécontents et le service client.
BM : Quels conseils pourriez-vous donner aux lecteurs qui veulent se lancer dans l’entreprenariat, notamment parmi les gens de la diaspora ?
Je constate une dynamique considérable chez les africains de l'Allemagne depuis 10 ans. Davantage de diplômés d´universités ou de centres de formations spécialisées se lancent dans les affaires. Il est évident que la peur du risque est encore grande chez beaucoup, mais l'échange d'informations et le réseautage pourront à l´avenir donner plus de confiance et créer une synergie et un environnement business. Je conseillerai donc à tous ceux qui ont une passion, de commencer par se mettre en réseau. De nos jours, l´information est la première matière première de l´entreprenariat. Et surtout savoir choisir son environnement !
BM : Pour finir, en tant que camerounais résidant en Allemagne, quel est selon vous l’apport de la diaspora pour le développement des pays africains ?
La diaspora joue déjà un rôle très important du fait de son implication dans le bien être des familles. L´intensité du travail de réseautage au sein de la diaspora permet aux compétences de se valoriser et la synergie qui y naît est prometteuse pour une action plus coordonnée en direction de l´Afrique.
Nous souhaitons aussi une volonté réelle des autorités publiques à vouloir intégrer de façon effective la diaspora dans le processus de développement. L´Afrique peut se réjouir du capital social que constitue la diaspora et je suis certain que dans quelques années nous aurons réussi, tous ensemble, à améliorer la qualité de vie et impacter le développement du continent.
C.L
BM : Bonjour ! Tehui, en bref, c’est qui ?
Tehui, c'est un artiste rappeur franco-ivoirien. Artiste rappeur, mais fou de musique, fou d'art, fou de culture et de partage.
BM : Peux-tu nous présenter 5 moments clés de ton parcours ?
Ma rencontre avec Kim, Mathieu Garillon. C'est un compositeur et ami que j'ai rencontré à Montpellier, lors de mes années universitaires. C'est lui qui m'a initié à la musique assistée par ordinateur. C'est lui qui m’a initié au rap d'un certain niveau ; au fait d'écouter de la musique de façon un peu plus profonde, de faire de la recherche, d'aller au-delà de ce que les médias nous montrent. En fait, il m'a donné envie de rapper. Là, il ne s'agissait plus de rapper les morceaux de personnes qu'on connaissait, mais les nôtres.
Mon retour en Côte d'Ivoire et ma rencontre avec Nunshak. Quand je rencontre Nunshak, c'est lui qui me donne envie de reprendre la musique puisque quand je rentre à Abidjan, je suis déconnecté. Je n'ai plus vraiment d'amis. La plupart de mes amis sont en Europe. Donc quand je rentre, j'arrête le rap et je me contente juste d'aller regarder des spectacles en live. Nunshak, quand je le rencontre, je vois qu'il est beatmaker et je lui dis que je rappe. Il me propose d’essayer un truc et du un truc, ça a donné tout ce que vous avez vu par la suite.
Ma première véritable grosse scène professionnelle. C'était au festival ABIJAZZ, organisé par Gérard Konan et son collectif ABIJAZZ. C'est un festival avec plusieurs jeunes groupes de jazz, avec des jeunes musiciens et j'étais le seul rappeur invité pour cet évènement-là. Je suis venu avec un orchestre et nous avons proposé des compositions très inspirées de jazz, alors que je n'avais encore sorti aucun album, ni projet.
La sortie de mon premier album en avril 2017, « Itinéraire d'un gars (a)normal ». C'est vraiment un moment clé parce que c'est l'aboutissement de plusieurs années de travail, de passion. Ça change tout, quoi !
La première fois que j'ai fait un concert en dehors de mon pays. C’était un festival, à Cotonou, au Bénin. Et donc, c'était la première fois que je jouais ma musique devant de « véritables » inconnus, où des gens d'un autre pays découvraient ma musique. Cette interaction avec des étrangers, c'était formidable.
BM : Quelle est ta vision d’une carrière musicale ici en Côte d’Ivoire ?
Une carrière musicale en Côte d'Ivoire, c'est déjà une carrière musicale un peu partout.
C'est de plus en plus difficile parce qu'aujourd'hui, dans les métiers de l'art, il y a de moins en moins de producteurs, la musique demandant beaucoup de moyens.
La musique demande de gros investissements pour tout ce qui est production ; c'est-à-dire création de musique, création de visuels, promotion, organisation de scène. Et ces moyens-là se font de plus en plus rares ; contrairement aux années phares, où l'industrie du disque cartonnait avec l’appui de maisons de disques, à la recherche de nouveaux talents. Aujourd'hui, l'industrie a beaucoup changé avec Internet. Donc, la consommation a changé.
Il y a de plus en plus de streaming et le streaming rapporte très peu aux artistes. Donc, une carrière musicale dans un contexte mondial déjà difficile ; en Côte d'Ivoire, c'est encore plus compliqué puisque la monétisation n'est pas la même. En Côte d'Ivoire, pour développer une carrière dans la musique, il faut déjà avoir les capacités d'être indépendant. Indépendant, ça veut dire en autoproduction. Le modèle qui a marché dans les années 80-90 en Côte d'Ivoire et même début 2000, où un artiste talentueux cherchait un producteur. Pour moi, ce modèle est mort. Il faut aujourd'hui, pour l'artiste, trouver des moyens de financement, soit par des activités qui génèrent des revenus. Soit par l’organisation d’une stratégie d’attaques de scènes vraiment efficace pour évoluer dans sa carrière musicale.
BM : De manière plus générale, comment utiliser les arts et la culture comme vecteur de développement sur le continent ?
L'un des grands problèmes du continent, se situe au niveau de l'éducation : on constate que les moyens ne sont pas mis dans l'éducation, même si les écoles sont là. On pourrait même presque se dire que c'est une volonté politique de refuser que la jeunesse accède à un certain savoir. Et si on remarque bien, tout ce qui est arts et culture éveille l'esprit et attise la curiosité. Je pense que les arts peuvent intervenir dans ce sens-là. Lorsque vous introduisez les arts dans le système éducatif, comme la poésie, le chant, l'art, le slam, ça attise l’intérêt des jeunes. Mettre l'art dans le système éducatif peut envoyer les jeunes à être curieux et à se rapprocher un peu plus de la lecture. Parce qu'aujourd'hui, un beau texte de musique, de rap, de slam, une belle chanson, te demande certaines références, certaines figures de style. Et plus tu vas lire, plus tu vas être capable de faire de belles choses au niveau de cet art-là. Aujourd'hui, on ne lit plus en Afrique et un peuple qui ne lit pas, on sait très bien qu'il est voué à l'échec. Il ne remettra rien en question. Parce que quand tu es dans un prisme fermé et quand tu es vraiment limité dans ton cercle, dans ta vision tu ne peux pas avoir une ouverture sur le monde. L'art ouvre l'esprit.
BM : Peux-tu partager avec nous ce qui te motive ? Une chanson, une citation, une personne/personnalité, … ?
il y en a beaucoup ! Mais il y a un bouquin que j'ai lu et le titre même du bouquin m'inspire. Le titre est "La vie en spirale". L'auteur est Abasse Ndione. C'est un auteur sénégalais qui était prof à l'Université de Bordeaux, si je ne me trompe pas et qui est rentré maintenant à Dakar. C'est un écrivain fantastique. "La vie en spirale", je vous le recommande. Je l'ai lu plusieurs fois et je ne veux pas "spoiler", mais ça m'inspire. Et de temps en temps, sans même lire le livre, en regardant seulement la couverture (il est sur ma table de chevet), je souris. Je regarde la couverture et je me rappelle du récit et des personnages, parce qu'il y a pas mal de leçons de vie dans ce roman-là sur les coups de la vie. Je n'en dirai pas plus. Ça m'inspire beaucoup dans tout ce que je fais.
Merci à vous. Bonne continuation.
C.L